Pseudoceros lindae Newman & Cannon, 1994
Date: 29/03/2024
Observer: Valentin MANSUY

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Espèce répertoriée et décrite sur Doris : Distribution géographique Indo-Pacifique Ouest L'espèce est présente dans tout l'Indo-Pacifique Ouest depuis les côtes sud-africaines et la Tanzanie, Madagascar et Mayotte. On la rencontre plus à l'est aux Philippines, dans toute l'Indonésie ainsi qu'en Nouvelle-Guinée. Sa limite orientale de distribution semble se situer sur les côtes est de l'Australie et sa grande barrière de corail. Biotope Cette espèce se rencontre sur les pentes récifales, jusqu'à une vingtaine de mètres de profondeur. Description Le corps fin de ce grand ver plat, pouvant mesurer jusqu'à 8 cm de long, montre à l'avant, deux extensions bien visibles : les pseudo-tentacules. Ceux-ci sont larges et sont formés par de simples replis de la marge antérieure du corps. Ces pseudo-tentacules sont généralement marqués de blanc avec une zone bleue en marge antérieure. La couleur du corps généralement observée est un bordeaux lie-de-vin (cela peut aller du brun très sombre au violet) s'intensifiant légèrement du centre vers les bords. Puis cette couleur se dégrade rapidement vers du gris bleuté pour former une large marge claire, cernée d'une très fine ligne blanche plus ou moins visible. Le corps est semé de nombreux points jaune d'or à orange, même si selon les individus la taille des points peut varier et leur forme être moins régulière. En s'approchant de la marge, ces points perdent parfois de leur rondeur et changent de couleur, devenant blancs ou bleus. On distingue parfois, notamment chez les petits individus (juvéniles ?), une ligne médiane jaune-orange plus ou moins large. Elle semble perdurer chez les adultes selon les zones géographiques mais est absente chez d'autres spécimens. La face ventrale est mauve pâle. Espèces ressemblantes Il y a peu de risques de confondre Pseudoceros lindae avec un autre ver plat, le graphisme de sa robe étant assez spécifique. Citons néanmoins Pseudobiceros pardalis (Verrill, 1900), qui peut également montrer un semis de points jaune d'or sur le dos. Mais la marge du corps est noire et parsemée de nombreux petits points blancs, ce qui distingue clairement cette espèce de P. lindae. Il s'agit en outre d'une espèce principalement caraïbe. Les vers plats colorés pourraient être, au premier abord, confondus avec des nudibranches tout autant bigarrés. En effet, certains doridiens ont un corps ovoïde et semblent peu épais, à l'instar des vers plats. De plus, les deux plissements des bords à l'avant du corps des vers plats peuvent rappeler la forme des rhinophores* des nudibranches. Mais cette erreur ne résiste pas à une observation attentive : les vers plats sont extrêmement fins (les nudibranches ne le sont jamais autant), ils ne montrent jamais d'organes respiratoires (les nudibranches ont un panache branchial) implantés sur le dos et leur reptation est différente de celle des nudibranches. Alimentation La majorité des Plathelminthes se nourrissent d'ascidies. Il doit en être de même pour le ver plat de Linda, dont le tractus digestif est adapté à la prédation sur les ascidies coloniales, mais à notre connaissance il n'y a pas d'étude ou d'observation pour attester des espèces consommées. Reproduction - Multiplication Les Polyclades sont hermaphrodites* avec des systèmes reproductifs mâle et femelle simultanément opérationnels, et conjointement utilisés pour la reproduction sexuée. Chez Pseudoceros lindae, le pénis, ou stylet, est localisé en face ventrale dans une cavité mâle, après la zone pharyngienne. Et juste derrière se trouve le pore femelle. Celui-ci ne sert pas pour l'intromission des gamètes* mâles, cette transmission étant intra-cutanée. En effet, la reproduction ressemble à une sorte de "combat" très visuel, violent et gracieux à la fois, fait d'approches et d'enroulements réciproques. Durant cette "danse-bagarre copulatrice", chacun des protagonistes tente de perforer le corps de son alter ego de son stylet pointu, telle une seringue hypodermique, et ce afin de lui inoculer sa semence. Qu'importe la localisation de l''insémination, les spermatozoïdes* migreront dans le corps du récepteur pour arriver in fine au niveau des gonades* femelles. Les spermatozoïdes injectés sont bi-flagellés et la fécondation des œufs est donc interne, qui se fera au niveau des oviductes*. La ponte de Pseudoceros lindae est émise par le pore génital femelle, en face ventrale. Les larves* ciliées* qui émergeront des œufs (la larve caractéristique des Polyclades, appelée larve de Müller, ressemble parfois à une larve trochophore* à 8 lobes*) seront pélagiques* et nageuses durant quelques jours, avant de se métamorphoser*. Les individus, enfin benthiques*, ne feront encore que quelques millimètres. Puis ils se développeront jusqu'à la taille adulte. Les vers plats ont également le pouvoir de se multiplier par scissiparité*. Grâce à des cellules souches migratrices, un simple fragment de leur corps peut se développer et donner un nouveau ver plat complet, clone génétique du parent, qui peut donc lui même régénérer le fragment manquant. Divers biologie Comme chez tous les Polyclades, le tube digestif, comprend une bouche, située en face ventrale. Situé dans le premier tiers du corps, un pharynx complexe, musculeux, est caractéristique du groupe, montrant plusieurs lobes ramifiés et s'étendant dans toutes les directions. Le système excréteur, des proto-néphridies*, est rudimentaire. Le ver plat de Linda n'a pas de système circulatoire et n'a pas d'appareil respiratoire différencié : sa respiration est cutanée. Sur la bordure des pseudo-tentacules des Pseudoceros, il existe des zones d'afférences lumineuses (appelées "yeux tentaculaires") peu visibles. En arrière de ces pseudo-tentacules, sur le dos, se trouve également une tache oculaire, organisée en forme de croissant et comprenant de nombreux yeux cérébraux (des cellules sensibles à la lumière, reliées au ganglion cérébral). Chez Pseudoceros lindae, on peut effectivement distinguer une petite zone de nuance légèrement différente, sur la base arrière des pseudo-tentacules. Une partie adhésive se trouve sur la face ventrale du ver plat de Linda, vers le milieu du corps. Mais cette zone est très difficile à voir car il s'agit parfois juste d'une petite bosse, d'un bourrelet ou d'une légère dépression dans l'épiderme. sorte de ventouse combine des fonctions musculaires et adhésives. La présence de cet organe fonde l'appartenance de Pseudoceros lindae au sous-ordre des Cotylés. Les déplacements sont assurés à la fois par un épiderme cilié, avec une densité de cils beaucoup plus forte sur la face ventrale, et de puissants muscles dorsaux-ventraux ainsi que circulaires. La ligne médiane orange, présente ou pas selon les individus, semble néanmoins être une constante chez les spécimens trouvés à Mayotte ou Madagascar. A noter que cet élément est absent de la description initiale de 1994. Informations complémentaires Les motifs et couleurs bigarrés de certaines espèces de Polyclades se rapprochent parfois de ceux de Nudibranches doridiens. On connaît des espèces de vers plats qui imitent carrément la robe d'une espèce donnée de doridien. La raison en est probablement simple : les doridiens en question sécrètent des répulsifs chimiques, sont souvent immangeables ou toxiques. Et ils le font savoir à d'éventuels prédateurs en affichant des livrées dites aposématiques*, de façon à ce que ces derniers, associant motifs, couleurs et mauvaises expériences, se tiennent à distance. Il suffit alors pour d'autres espèces d'animaux, dont des vers plats, d'imiter ces livrées aposématiques pour faire passer, à juste titre ou pas, une information similaire : "je ne suis pas mangeable". Les pseudo-tentacules antérieurs viennent sans doute appuyer le message en ayant l'aspect des rhinophores que portent les doridiens. Leslie J. Newman, descriptrice de cette espèce qu'elle a dédiée à sa propre mère, nous a quitté le 21 septembre 2015, durant la rédaction de cette fiche. Elle était l'une des plus grandes, sinon la plus influente spécialiste des Plathelminthes Polyclades dans le monde sur ces 40 dernières années. Elle a décrit beaucoup des principales espèces que nous connaissons aujourd'hui et a contribué de manière essentielle au savoir que nous avons actuellement sur ces animaux marins. Amateurs passionnés comme professionnels, nous lui devons beaucoup

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